C’est une nouvelle parution de l’excellente maison d’éditions Les Petits Platons qui s’adresse, entre dessins et savoir, aux jeunes philosophes.
Cette nouvelle parution est d’actualité : par son titre, d’abord, qui résonne, à ces quelques jours du second tour, Socrate président !, et puis, surtout par son intrigue, que l’on peut résumer assez simplement par cette question : comment peuvent bien se débrouiller le philosophe amoureux de la justice, Socrate, et le maître des sophistes, Gorgias, envoyés à notre époque, époque dépeinte comme celle des masses, de la consommation et du plaisir ?
Plus précisément, l’art de plaire de Gorgias va-t-il trouver de quoi s’épanouir à notre époque, justement, de faux-semblants et de faux-discours ? Ou la demande de justice de Socrate et sa volonté de penser le vrai, le bon, le beau peuvent-elles, au contraire, trouver un écho favorable à notre époque, aussi, où l’injustice se fait sentir avec violence ? Ou, alors, faut-il vraiment choisir entre l’un et l’autre ? Et si le mieux était que la voix de l’un s’associe au savoir de l’autre ?
C’est justement l’idée de départ de cette histoire : Minos s’apercevant que le Tartare s’emplit d’âmes injustes, fait revenir Socrate à la vie pour qu’il enseigne aux hommes comment devenir meilleurs. Mais comment convaincre chaque homme quand ils sont si nombreux et avec sa méthode douloureuse et longue de la maïeutique ? Là est l’idée de génie de Minos, que Gorgias, ancien adversaire de Socrate, l’accompagne pour rendre son discours audible, attrayant, à même de toucher et de mobiliser les hommes, que Gorgias, précisément, suscite l’adhésion à cette thèse de Socrate : « Mieux vaut subir l’injustice que la commettre ».
Mais comment rendre une telle thèse attrayante ? Là est le problème : comment parer la justice de beaux discours sans la corrompre ? Est-ce encore de la justice si elle n’apparaît pas toute nue ? Et en même temps, se parer, est-ce nécessairement mentir ? Jusqu’où la justice est-elle donc entachée par ses moyens ? Entre Socrate, qui refuse de s’adapter, et Gorgias, le caméléon, qui prend ici le visage d’un Donald Trump, l’alternative persiste donc, la question reste ouverte, au moins jusqu’au dénouement de ce livre.
Bibliographie
Socrate Président !Les Petits Platons, 2017